Libérez votre imagination
Les clés pour lui ouvrir la porte !

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Vous rêvez !

Que vous vous en souveniez ou pas, vous rêvez pendant votre sommeil. Comme tout le monde.

Votre cerveau invente des histoires étranges et rocambolesques. Votre cousin a la tête d’un chien et vous cherchez vos clés dans des chaussettes suspendues à l’entrée.

Oui, les rêves n’ont pas de limite. Ce n’est pas étonnant si les surréalistes utilisaient le rêve et l’inconscient pour créer1.

Image surréaliste2

Mais comment expliquer la force et la vivacité des rêves ? N’est-ce pas étonnant que notre imagination si forte pendant le sommeil, s’évanouisse au réveil ?

Et si justement c’était là le signe que notre imagination était bloquée. Une imagination belle et bien présente, mais emprisonnée en quelque sorte. Et nos rêves débridés ne seraient que le signe que les portes de la prison sont ouvertes pendant ce temps.

Mais serait-il possible d’ouvrir ces portes, pendant l’état d’éveil ? Ce serait une opportunité géniale non ? L’imagination permet d’inventer, et réinventer à l’infini, de pouvoir voyager sans bouger et inventer un monde qui n’existe pas.

Dans cet article de blog, je vais vous expliquer pourquoi notre imagination est emprisonnée, et surtout comment vous y prendre pour la libérer.

De quoi vous aider pour :

  • de l’imagination artistique : arts plastiques, fiction, musique, etc
  • de l’imagination pratique : trouver des solutions pour la création d’un meuble par exemple
  • des solutions imaginatives : comme la personne qui a imaginé un système de longs bras pour nettoyer la mer de ses plastiques

En bonus, cette solution présente de nombreux autres avantages3 : moins de distraction, plus de contrôle émotionnel, plus d’efficacité, moins de ruminations stériles, etc

Pourquoi notre imagination est bloquée ?

La discussion tourne en rond.

Ce que raconte Fred n’est pas inintéressant, c’est juste un peu connu d’avance.

Pendant ce temps, Sarah écoute et écoute encore. Jusqu’au moment où une personne s’approche, demandant gentiment à Fred d’écouter la gentille femme en face de lui.

Sarah prise au dépourvu, trouve finalement plein de choses originales et intéressantes à dire. Et avec Fred qui alimente désormais la discussion, le bavardage redémarre plein d’entrain.

Cette scène, c’est un peu ce qui se passe… dans notre tête. Sarah incarne notre capacité de réflexion et Fred nos automatismes4

L’inconnu quant à lui n’est rien d’autre que notre faculté à résister à nos automatismes5. C’est lui qui peut freiner les ardeurs de Fred.

Cette capacité de résistance répond au doux nom d’inhibition (ou contrôle inhibiteur), et fait partie d’un ensemble de compétences appelées fonctions exécutives.

Pour vous en rendre compte, voici une illustration. Quelle est la couleur de ces mots ?

Tâche de Stroop

Ce n’est pas simple.

Par réflexe, vous cherchez à lire les mots. Il faut donc y résister pour pouvoir dire leur couleur. Si vous souhaitez vous entraînez, j’ai réalisé une version en ligne de la tâche de Stroop.

De la même façon, il y a un temps de latence, quand on doit s’imaginer dans les baskets d’une autre personne pour savoir si cette personne tient une balle dans la main gauche ou droite6. Dans ce cas, c’est notre propre corps qui vient parasiter. Encore une fois, il faut résister.

Mais quel lien avec l’imagination me direz-vous ? Il semblerait que notre capacité à résister aux automatismes nous permette d’être plus créatif7. Notamment parce que nos automatismes nous poussent à nous fixer sur un nombre limité d’options8.

Mais cela peut paraître également logique. Imaginer, c’est penser à ce qui n’est pas là9. Tout ce qu’on voit, entend, ressent vient parasiter notre capacité à imaginer. Il faut alors encore et toujours résister.

Pas étonnant que de nombreux artistes ferment les yeux pour créer. Je pense à des danseurs ou des musiciens par exemple.

Pas étonnant également que, privé des sensations extérieures, notre imagination s’envole pendant nos rêves.

Mais alors, comment résister ? C’est ce que nous allons voir dans la suite.

Comment résister et développer votre imagination ?

Résister, on le fait déjà tous intuitivement.

Si vous écrivez “je les mange” au lieu de “je les manges”, c’est déjà résister. C’est résister à l’automatisme qui consiste à ajouter un ‘s’ quand le mot est précédé par ‘les’10.

Quand vous faites une action désagréable, parce que c’est sage de la faire, vous résistez.

Quand vous décidez d’arrêter de ruminer, et de passer à autre chose, encore une fois vous résistez.

Sauf handicap particulier, tout le monde sait le faire. Mais également tout le monde échoue à un moment ou un autre. Comme ce moment où vous regardez votre smartphone par réflexe, alors que vous êtes sur une tâche importante11.

Mais alors comment éviter d’échouer ?

Il suffit d'être mis en garde du piège et de se forcer à résister. C'est aussi simple que ça.

C’est ce qu’a étudié Olivier Houdé et les résultats sont surprenants. En prévenant les gens, “faites attention à ce piège, il faudra y résister”, les gens ont fait des progrès spectaculaires. De son côté, la répétition de l'exercice et l'explication logique de l'erreur n'avaient pas d'effet.

...le taux de réussite, initialement inférieur à 10 pour cent, a dépassé les 90 pour cent lors de la résolution du second problème.
Olivier Houdé, Inhiber son cerveau pour raisonner

Être mis en garde, c’est tracer les contours de notre ennemi, c’est savoir où l’on risque de flancher. Par exemple, vous pouvez flancher en mettant un 's' dans "je les manges", alors il faut résister.

Et justement, c'est le moment de vous mettre en garde contre un autre type d'erreur. Prenez conscience que votre environnement vous piège, qu’être à votre place maintenant vous piège.

Et oui, votre humeur du moment, votre vision du monde, l’ambiance qu’il y a autour de vous, vous empêche de vous évader en imagination.

Être triste vous empêche de penser à ce qui est coloré et joyeux ; être à l'intérieur vous empêche de penser aux grands espaces  ; être joyeux vous empêche de penser à ce qui est paisible ou mélancolique.12

Lorsque nous faisons les courses avec la faim au ventre, nous achetons plus de choses. Comme si nous considérions notre faim présente comme permanente13.

Le présent vient bloquer l'imagination

Daniel Todd Gilbert expose tous ces problèmes en long en large et en travers dans son livre Et si le bonheur vous tombait dessus. Résultat : ce que nous vivons au présent a un impact considérable sur notre vie.

Résistez, vous n’avez rien à perdre. Tentez de sortir de vous-même, d’imaginer le plus fort possible ce qui n’est pas là. Il faut envisager qu’il existe d’autres choses que vous n’imaginez pas maintenant.

Et plus vous le ferez, plus ce sera facile.

Rentrons maintenant dans la technique à proprement parler.

1 La conscience des pièges

On l’a vu. Tout ce qui est présent, là maintenant, nous piège.

Il faut donc en prendre conscience :

  • quelle est votre émotion de l’instant ? vous êtes enthousiaste, agacé, ça fluctue ?
  • comment vous sentez-vous ? Vous avez chaud, froid, vous êtes en forme ou fatigué ?
  • que voyez-vous autour de vous ? Un mur presque blanc, un poster ? Vous êtes dans un parc ?
  • qu’entendez-vous ? Des oiseaux, le bruit d’un ordinateur, du bois qui grince ?
  • qu’est ce que vous vous dites ou qu’étiez-vous en train de vous dire ? Que ça ne sert à rien, que vous n’allez pas y arriver ? Ou êtes-vous distraits par des pensées qui n’ont rien à voir ?

La bonne nouvelle, c’est que ce type d’exercice, inspiré de la pleine conscience14, améliore la créativité à force d’être pratiquée15.

Mais surtout ça pointe du doigt vos pièges. L’étape d’après sera d’en sortir.

2 Voir plus loin

C’est le moment de vous échapper.

Allez voir plus loin. Concevez ce qui n’est pas là. Vous avez chaud, imaginez ce que ça fait d’avoir froid. Si vous êtes à l’intérieur, imaginez des grandes plaines. Si vous entendez des bruits de voiture, imaginez ce que c’est d’être sous une cascade.

Concevez qu’il existe des choses… que vous ne concevez pas maintenant.

Si vous créez une histoire, imaginez ce que ressent votre personnage, dans SA situation, avec SA vision du monde.

Si vous cherchez des idées de solution, faites comme Jacques Fradin et répertoriez tous les moyens possibles. Des plus évidents, aux plus lointain. Faites preuve de curiosité.

Si vous créez un meuble, allez chercher ailleurs que votre culture ou manière de faire. Allez chercher loin.

D’autant plus qu’aller chercher loin, c’est prendre de la distance. Et prendre de la distance booste la créativité, comme je l’ai déjà traité par ailleurs.

3 Imaginez

Le “voyage” était agréable ? Maintenant, vous allez vous inspirer de celui-ci pour créer.

Peu importe votre domaine de prédilection, c’est le moment de faire des choix, de synthétiser, de simplifier, d’exclure.

Oui, créer, imaginer, ce n’est pas simplement s’évader, c’est aussi choisir.

Si vous écrivez une nouvelle, tentez des idées d’histoires : un enfant vivait près d’une grande forêt. Il y passait le plus clair de son temps, jusqu’au jour où il rencontra un enfant identique à lui.

Si vous créez un meuble, essayez d’imaginer comment moderniser un meuble baroque.

Exemple de siège baroque et moderne16

Si vous cherchez une solution pour éclairer avec un minimum de lampes, tentez le mélange entre lampes classiques et objets phosphorescents.

Voilà, tout est là, passons à quelques détails pratiques.

En pratique

Vous pouvez utiliser cette méthode au cas par cas, mais vous pouvez également vous y entraîner, car résister ça se travaille.

Vous pouvez par exemple prendre 15 minutes par jour pour cela. Le sujet importe peu dans ce cas. Amusez-vous :

  • à imaginer un personnage haut en couleur
  • à trouver le résumé d’une histoire
  • à inventer un meuble géant
  • à trouver une manière originale de créer une présentation
  • à trouver une solution pour gagner 30 minutes par jour

Il existe également d’autres méthodes d’entraînement. Comme compter en même temps que réciter l’alphabet : 1-a, 2-b, 3-c, etc.

Vous pouvez jouer à ni oui, ni non ou pratiquer la méditation de pleine conscience17.

Vous pouvez vous entraîner sur la tâche de Stroop en ligne. Dans ce jeu, il faut se retenir de lire le mot, il faut juste dire sa couleur. Et vous pouvez même faire une partie pour vous évaluer. Quand vous avez trouvé la réponse, cliquez dessus. A la fin, vous aurez votre score, ainsi que votre temps. Tout juste, en moins de 34 secondes, ça me parait vraiment pas mal !

Prêtez l’oreille

Pour aller plus loin, je vous recommande l’excellent livre d’Olivier Houdé, Apprendre à résister. Cela ne vous prendra pas trop de temps, le livre est plutôt court et écrit simplement. Pour plus d’infos sur le contenu du livre, c'est ici.

Résister, ce n’est pas simplement dire non à nos automatismes, c’est aussi dire oui à notre imagination. Elle n’attend que ça, alors ouvrez lui la porte, prêtez un peu l’oreille et elle vous racontera de bien belles histoires.

1 : Le Manifeste surréaliste et ses rapports avec l’inconscient
2 : Création par suzannp4 en licence libre CC0
3 : Inhibition : habileté cognitive qui fait partie des fonctions exécutives
4 : Système 1 / Système 2 - Les deux vitesses de la pensée
5 : Apprendre à résister par Olivier Houdé
6 : Les jeux cérébraux vont-ils remplacer les devoirs ?
7 : Do We Need Inhibitory Control to Be Creative? Evidence From a Dual-Task Paradigm
8 : Understanding fixation effects in creativity: A design-theory approach
9 : Imagination, définition Larousse
10 : Les jeux cérébraux vont-ils remplacer les devoirs ?
11 : Inhibition : habileté cognitive qui fait partie des fonctions exécutives
12 : Out of Control: Visceral Influences on Behavior
13 : Predicting Hunger: The Effects of Appetite and Delay on Choice
14 : ACT ; Faire face à la souffrance, Benjamin Schoendorff, Éditions Retz, 2009, p.41
15 : Mindful creativity: the influence of mindfulness meditation on creative thinking
16 : Par alles, licence libre CC0
17 : Les jeux cérébraux vont-ils remplacer les devoirs ?

Un regard atypique pour changer : vous, votre vie, le monde

Ma vie, c’était comme un vélo crevé, qui n’arrivait pas à rouler. Alors, j’ai cherché des solutions partout. Et j’ai fait de nombreuses découvertes. Comme…

Pourquoi utiliser une “tout doux liste” plutôt qu’une todo list ? Pourquoi la méthode VIF rend-elle plus efficace ? Quel est le mode d’emploi de la bienveillance ? Et c’est quoi la carte du bonheur ?

Puis un jour ça m’est tombé dessus : j’ai découvert que j’étais autiste… Ça expliquait mes difficultés et mon regard tout particulier sur les choses. Aujourd’hui, j’aimerais vous le faire partager. Alors pour commencer à changer… démarrez ici !

Ce contenu est en licence libre CC BY (en bref, vous pouvez utiliser et modifier mes créations en citant Holographik.fr), y compris pour les images et infographies que j'ai créées. Certaines images cependant ne sont pas de ma création, notamment des photos, et sont tombées dans le domaine public.